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L’art et sa survie

Dans les années 1980, Rick Hansen, activiste britanno-colombien, parcourt 40 000 kilomètres en fauteuil roulant afin de sensibiliser les populations des 34 pays traversés au potentiel des personnes handicapées. Aujourd’hui, la Fondation Rick Hansen (FRH) continue de militer en faveur d’un monde inclusif et accessible. Brad McCannel, chargé du programme de certification de l’accessibilité, et Kristen Habermehl, formatrice en accessibilité, discutent de la question avec Block : les effets souvent invisibles de la mise en accessibilité et les raisons de l’impuissance du code du bâtiment.

PAR: BRAD MCCANNELL AND KRISTEN HABERMEHL
PHOTO PAR: Maxime Brouillet

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En 2021, la municipalité néo-écossaise de Peggy’s Cove s’est dotée d’une plateforme panoramique accessible, permettant aux personnes en fauteuil roulant ou se déplaçant avec difficulté de profiter de la beauté naturelle du site, son anse et son phare, notamment. Ces installations ont obtenu la certification d’or de la FRH.

Brad McCannell : L’énoncé de mission de la FRH, à savoir supprimer les obstacles auxquels se heurtent les personnes ayant un handicap, est large pour une bonne raison : nous permettre d’aborder le problème sous n’importe quel angle. Pour éviter de nous éparpiller, on a créé le programme de certification. Ce n’est pas un autre règlement, c’est un système d’évaluation. Nous ne sommes pas là pour pointer les erreurs du doigt. Nous sommes là pour évaluer l’accessibilité d’un lieu afin que vous sachiez par où commencer.

Kristen Habermehl : La FRH se distingue par son approche, très différente de tout ce que j’ai vu auparavant. C’est vraiment intéressant. Je n’ai jamais entendu un gestionnaire de bâtiment se plaindre du processus. Même si on doit travailler fort pour trouver une seule chose accessible, notre discours reste positif et on met en avant tout ce qui a été bien réalisé. Neuf fois sur dix, les gens ne savent pas en quoi consiste vraiment l’accessibilité. Lors de mes évaluations, j’en ai vu certains enlever des paillassons en me disant qu’ils n’avaient jamais pensé qu’on risquait de trébucher dessus.

B. M. : L’opposition ne mène à rien, la discussion avec les constructeurs, si, puisqu’une partie du problème consiste à suivre les règlements sans en comprendre les répercussions. Presque 50 % des adultes canadiens ont un handicap temporaire ou permanent ou vivent avec quelqu’un qui en a un, pourtant nous ne sommes toujours pas considérés comme un marché. On dit souvent que si c’est bien conçu, on viendra.

K. H. : J’ai participé au projet de Peggy’s Cove, en Nouvelle-Écosse, de la conception à la construction. Cet été, ces installations ont obtenu la certification d’or en matière d’accessibilité. Voir des visiteurs de toutes capacités utiliser ce lieu, interagir et en profiter d’égal à égal est la chose la plus gratifiante qu’on puisse imaginer.

B. M. : Le code du bâtiment n’aide pas les propriétaires ou locataires à apporter des changements significatifs. Il est là pour dire quoi faire, pas pour comprendre. Idem du côté des urbanistes, qui ne comprennent pas les besoins de la population. Les architectes auraient également besoin d’une formation plus poussée, mais la décision finale ne leur appartient pas. Si les décideurs ne priorisent pas l’accessibilité, ça n’avancera pas.

“Une fois qu’on commence à voir les obstacles sur la route des personnes handicapées, on en voit partout.”

K. H. : Avant d’entendre parler de la FRH, je travaillais avec mon mari dans notre entreprise d’aménagement. Un de nos clients souhaitait qu’on rende sa maison entièrement accessible et nous, on se rendait compte de nos lacunes en la matière. Après ma première formation en accessibilité à la FRH, ma vision du monde a changé. Le tas de petit bois était déjà fait, il suffisait que quelqu’un craque l’allumette. On ne voit pas ce qu’on ne sait pas.

B. M. : C’est un point important. Une fois qu’on commence à voir les obstacles sur la route des personnes handicapées, on en voit partout.

K. H. : Les décideurs qui collaborent avec nous prennent conscience petit à petit de ce qu’ils ne comprenaient pas, de ce qu’est le libre accès pour tous. C’est une expérience formidable que de les aider à le mettre en pratique.

B. M. : Le libre accès, c’est utiliser pleinement un lieu à partir du moment où on en franchit la porte.

K. H. : Pour moi, c’est se déplacer dans un lieu bâti en toute autonomie, en toute sécurité et en toute dignité. C’est ne pas avoir besoin d’aide pour monter une rampe d’accès un peu trop raide, par exemple.

B. M. : Une chose à vérifier absolument, c’est les issues de secours. Le code du bâtiment se préoccupe de plus en plus de l’entrée des personnes à mobilité réduite dans les bâtiments, mais ne réfléchit pas assez à leur sortie. L’accessibilité des issues de secours n’est pas une obligation. La prochaine fois que vous prendrez l’ascenseur, regardez le petit panneau qui vous dit de prendre les escaliers en cas d’incendie. Il est où le petit panneau qui me dit quoi faire, à moi?

Cela fait partie des choses qui doivent être prises en compte dès le départ, dès la phase de planification. Un bâtiment qui répond à toutes les exigences minimales du code néglige les besoins de 70 % des personnes handicapées.

K. H. : Et cela ne coûte pas beaucoup plus cher si on le prévoit dès le départ.

B. M. : Le problème, lorsqu’on procède dans l’autre sens, est que la durée de vie d’un bâtiment est de 50 à 80 ans. L’architecture existante devient un frein, rendant tout aménagement difficile. Heureusement, il y a une prise de conscience : l’Institut royal d’architecture du Canada incite désormais ses membres à suivre la formation en accessibilité de la FRH.

Quand quelqu’un veut rendre son bâtiment accessible, je lui demande toujours accessible à qui? Aux personnes malvoyantes? Malentendantes? Accessible en tout temps, quel que soit le handicap? Cela ne sert à rien de dire qu’un bâtiment est accessible sans préciser, ou sans savoir, à qui.

K. H. : À chaque évaluation, je suis surprise de constater que les employeurs ne réalisent pas à quel point l’inaccessibilité de leur bâtiment les prived’un grand nombre d’employés parfaitement compétents.

B. M. : Selon le Conference Board du Canada, 57 % des personnes ayant un handicap physique, désireuses et capables de travailler sont sans emploi à cause d’obstacles sur le lieu de travail. Et les répercussions sont multiples, car si on a un emploi, on peut avoir un compte en banque. Si on a un compte en banque, on peut avoir une carte de crédit. Si on a une carte de crédit, on peut obtenir un prêt. Et si on a un prêt hypothécaire, alors peut-être que quelqu’un commencera à construire des maisons pour nous et non contre nous.

K. H. : Une autre réalité? Toute personne qui n’a pas de handicap est une personne temporairement valide. Il suffit d’un faux pas, d’un mauvais virage, d’une maladie pour qu’elle rejoigne ceux et celles qui ont besoin d’une plus grande accessibilité.

B. M. : Et tant qu’on n’aura pas accès au bâti comme tout le monde, notre participation à la société sera incomplète. Si on ne peut pas prendre un taxi ou un bus pour aller boire un verre au centre-ville, souper chez des amis ou manifester, alors on n’est pas un citoyen à part entière. La COVID-19 en a été un bel exemple. Tout à coup, la population valide ne pouvait pas aller travailler, ni prendre le bus, ni aller au cinéma. Bienvenue dans notre monde!

K. H. : Je crois que le choix du libre accès pour la collectivité est entre les mains de chaque Canadien et Canadienne. Plus on sera nombreux à en comprendre l’intérêt, plus l’élan se concrétisera.

Pour savoir comment améliorer votre accessibilité, visitez www.rickhansen.com/fr

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