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À l’horizon

À la fois artistes, universitaires et activistes, Queen Kukoyi, Nico Taylor et Quentin VerCetty dirigent ensemble le Black Speculative Arts Movement (BSAM) Canada, un collectif sans but lucratif qui s’inscrit dans le courant afrofuturiste, infusant l’imaginaire de culture, spiritualité et histoire des Noirs. Pour Block, tous trois discutent de l’avenir : ce à quoi il ressemblera (et quand) ainsi que des multiples possibilités qui découlent de la représentation, des échanges et de la pensée visionnaire.

Par Queen Kukoyi, Nico Taylor and Quentin VerCetty

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Q.K.: Nos destins sont liés. La libération noire est liée à la souveraineté autochtone parce que nous sommes des personnes volées sur des terres volées. Nous avons vécu des traumatismes et des déplacements de population semblables. Sans compter les nombreux liens où le colonialisme n’est pas impliqué, comme nos rituels et nos pratiques, qui font que nos cultures s’entrecroisent. Par exemple, on vient de réaliser un film, Rahyne, à propos d’une jeune personne afroautochtone qui est aussi non-binaire. Dans les deux cultures [noire et autochtone], il y a cette importance de l’eau, de la terre, de notre lien avec elle, avec nos rituels et nos ancêtres.

N.T.: J’ai une question : quand on réfléchit à l’avenir, est-ce le futur proche ou dans 200 ans? Et comment le voit-on, cet avenir?

Q.V.: Personnellement, si on parle d’art, je pense permanence et œuvres qui me survivront. C’est pour ça que je m’intéresse tant aux monuments et à l’art public.
Une des plus grandes erreurs sur la suprématie blanche est de croire que la construction de monuments est une pratique eurocentrique, alors que les Noks [du Nigéria et] du Bénin en construisaient en terre cuite vers 2 000-1 500 avant notre ère, soit des milliers d’années avant la naissance de Rome. Je vois un avenir plus inclusif quant à la représentation et la valorisation des personnes de couleur dans la sphère publique, et dans lequel les contributions des personnes noires à ce pays seront facilement accessibles.

Par exemple, plusieurs continuent de croire que les premiers Noirs qui sont arrivés au Canada étaient des esclaves. On ne parle pas de Mathieu da Costa à l’école. Pour ceux qui l’ignorent, il était interprète auprès de Samuel de Champlain, traduisant entre les peuples autochtones de Nouvelle-Écosse et les Français. Il avait été engagé en tant que linguiste et a débarqué ici avec son bateau et son équipage. C’était vers 1605, soit 20 ans avant l’arrivée du premier Africain asservi au Canada.

Lors de mes recherches sur les monuments canadiens, je n’ai trouvé que 16 statues de personnes d’origine africaine. Et dire que rien qu’à Queen’s Park [à Toronto], il y a tous ces généraux alignés, au moins 20! J’ai donc décidé de faire la 17e. Le buste en bronze de Joshua Glover est fait pour durer 1000 ans sans restauration. Je dirais donc que je réfléchis aux 1 000 ans à venir.

Q.K.: Ma principale théorie de l’existence est celle des univers parallèles. Donc, pour ma part, l’avenir se déroule, tout comme le passé et le présent, de façon simultanée. Je suis bipolaire de type 2, et je ne m’en cache pas. Cela influence mes réflexions et mes agissements. D’après un guérisseur spirituel, c’est comme vivre mes moi à différents niveaux. Un travail sur l’abondance et des exercices d’ancrage m’aident à me centrer et à m’ancrer à ce niveau-ci. Quentin et Nico peuvent confirmer mon mode de raisonnement. J’évalue une multitude de scénarios en quelques secondes : si on fait ceci, il va se passer cela, etc. Même si ça peut parfois être frustrant pour eux, j’espère que c’est surtout utile.

N. T.: Je trouve ça utile! En ce qui me concerne, je ne réfléchis pas à aussi long terme. Pour moi, l’avenir, c’est demain. Quand je crée, je pense à ce que l’œuvre pourrait inspirer aujourd’hui, demain peut-être, après-demain à la rigueur. Je fais les choses parce qu’elles ont un sens et que je sens qu’elles pourraient élargir le débat. Je les emplis d’un espoir, que tous ces échanges soient fructueux au bout du compte.
Je me croyais idéaliste, mais en fréquentant Quentin et Queen, je me rends compte que je suis plutôt du côté des réalistes. Les grands rêveurs, ce sont eux. Et c’est bien parce qu’on a besoin de gens comme eux pour voir au-delà de l’asservissement ou de la servitude, pour nous dire que ce n’est pas ça la vie, qu’il y a plus.

Q.K.: Ces discussions sont difficiles à avoir, surtout avec les personnes de notre communauté qui ont du mal à voir plus loin que leur situation actuelle. En tant que mère, j’apprends à ma fille que la vie est remplie d’inégalités et de défis, mais que, comme bon nombre de nos ancêtres s’en sont rendu compte, ce n’est pas tout : il y a du meilleur à l’horizon. Il y a cette idée dans l’afrofuturisme, dans la spéculation noire, que pour reconstruire, on doit d’abord démolir.

N.T.:Ou faire fonctionner les choses différemment en les piratant. J’aime beaucoup cette idée de piratage qu’on trouve dans l’afrofuturisme. On entre dans le système et on le bricole à sa sauce.

Q.K.: Je comprends que beaucoup de jeunes, et même des adultes, restent bloqués : quand on vit là-dedans tous les jours, on a du mal à voir au-delà. C’est comme ça que fonctionne un traumatisme, n’est-ce pas? Et le système en est un grand, qu’on subit à plusieurs niveaux, qu’on le comprenne ou pas. Ceux d’entre nous qui ont réussi à soi-disant s’en sortir… Je n’aime pas trop ce mot en fait… Ceux d’entre nous qui ont réussi à voir au-delà de leur vécu quotidien l’ont fait grâce à quelqu’un ou quelque chose (une rencontre, un livre) qui les ont aidés à penser autrement.

Pour en savoir plus sur le Black Speculative Arts Movement : bsamcanada.ca (site en anglais) et Cosmic Underground Northside: An Incantation of Black Canadian Speculative Discourse & Innerstandings, édité par Quentin VerCetty et Audrey Hudson (livre en anglais).

C’est là que les visionnaires entrent en jeu, pour tracer la voie.

QK: Our fates are tied. Black liberation is tied to Indigenous sovereignty because we are stolen people on stolen land. We both have experienced similar traumas and displacement. And there are so many linkages that don’t even involve colonialism—like our rituals and practices—that intertwine and intersect the two cultures. For instance, we’re doing a film that will be coming out in November called Rahyne. It’s about an Afro-Indigenous young person who’s also non-binary. In both [Black and Indigenous] cultures, there’s the importance of water and land and our connection to it, to ritual and our ancestors.

NT: I have a question. When we’re thinking about the future, is it the near future or 200 years down the road? What do we see as the future?

QV: For me, when it comes to art, I’m thinking about permanence and [creating] things that will last after I’m no longer here. That’s why I focus a lot on monuments and public art.

One of the biggest misconceptions of white supremacy is that monument-making is a Eurocentric practice, when the Nok people of [Nigeria and] Benin were making monuments out of terracotta around 2000 to 1500 BCE, thousands of years before the rise of Rome. I see a future that’s more inclusive in terms of representation and uplifting people of colour within the public sphere, with knowledge of the contributions of Black people to this country being readily accessible.

For example, people continue to think that the first Black people who came to Canada were enslaved. Schools don’t teach you about Mathieu Da Costa. If you don’t know, Da Costa was a translator with Samuel de Champlain’s party, translating between the Indigenous groups of Nova Scotia and the French. He came here as a hired linguist with his own boat and crew of people. That’s circa 1605, 20 years prior to the first enslaved African coming to Canada.

A lot of the research I do in my practice is around monuments in Canada. I’ve only been able to find 16 monuments of people of African descent (and there are all those generals, at least 20, lined up around Queen’s Park [in Toronto] alone). So, I made the 17th. The Joshua Glover bronze memorial is meant to last a thousand years before it needs mega maintenance. So, I’m looking at least a thousand years [into the future].

QK: My main theory of existence is parallel universes. So, for me, the future is happening simultaneously with the past and the present. I have Bipolar II and am very open about my diagnosis. It informs my way of thinking and my practice as well. I met with a spiritual healer, and he talked about it as an experience of my selves on different planes. A way for me to centre and ground myself in this plane is through abundance work and grounding exercises. But Quentin and Nico can attest to my thought process, assessing all these different scenarios within seconds—if we do this, then that can happen—which can be frustrating for them at times but is mostly useful, I like to think.

NT: I think it is useful! As for me, I don’t really think that far ahead— tomorrow is the future. So, when I create, I’m thinking about what the work could inspire today, maybe tomorrow, maybe the day after. I do things because they’re meaningful and because I see them contributing to a larger conversation. I imbue them with a hope that this conversation will end up being fruitful further down the line. I used to think I was an idealist, but being around Quentin and Queen, I’m beginning to learn I’m more of a realist. They’re the ones who dream big. But I appreciate that, because they’re the people we need to see beyond things like enslavement or bondage: for instance, to say, “This is not what life is—there’s more to what we are here.” That’s where the visionaries come in, to etch out those pathways.

QK: This is a hard conversation to have, especially with people in our community who can’t see beyond what they’re experiencing in the present. As a mother, I teach my daughter that our existence is filled with all these disparities and challenges but, like many of our ancestors realized, this ain’t it—there’s gotta be something better on the horizon. There’s an idea in Afrofuturism, in Black speculation, that you have to tear shit down to rebuild it.

NT: Or make it function differently by hacking it. I love this idea of hacking that comes from Afrofuturism. It’s taking the systems we know, going in there and tinkering.

QK: It’s understandable that a lot of young people, even adults, remain stuck, because when you’re living in it every day, it’s hard to see beyond it. That’s how trauma works, right? And the system is one big prevalent trauma that we experience on many different levels, whether we understand it or not. For those of us who’ve been able to so-called make it out—I don’t really like that expression, if I’m being honest—or those of us who’ve been able to think beyond what we’re currently experiencing, it was because someone or something (a person we met, something we read) helped us think alternatively

For more info on the Black Speculative Arts Movement, visit BSAMCANADA.CA and check out Cosmic Underground Northside: An Incantation of Black Canadian Speculative Discourse & Innerstandings, edited by Quentin VerCetty and Audrey Hudson.

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