
342 Water Street
Autour du 342 Water Street dans Gastown
Par: Kelsey Adams
PHOTOS Par: Othello Grey
Siphesihle November s’échauffe dans un coin de son appartement torontois, devenu son studio de fortune durant la pandémie de COVID-19. Tuque sur la tête, t-shirt des Def Leppard et pantalon large et confo, on est loin de la tenue normale du danseur de ballet, mais plus rien n’est normal.
Né à Zolani, en Afrique du Sud, Siphesihle s’installe au Canada en 2010 pour intégrer l’École nationale de ballet. Il est aujourd’hui le premier soliste du Ballet national du Canada : il n’a pu danser que deux fois dans Roméo et Juliette avant que la compagnie se voie obligée de baisser le rideau en mars dernier. L’incertitude régnant sur la suite de la saison, il a dû revoir sa manière de garder la forme et le moral. Il a alors eu l’idée de filmer ses improvisations et de les publier sur Instagram. Ce travail a été thérapeutique : « C’est ce qui m’a empêché de virer fou », confirme-t-il.
Siphesihle aime l’hybridité : le ballet, bien entendu, mais aussi la danse contemporaine, le jazz, le kwaito (populaire en Afrique du Sud), le hip-hop et, surtout, les lignes élégantes. Habitué à l’immense scène du Four Seasons Centre, il doit ajuster ses mouvements. Quand il danse sur la bouleversante interprétation de Isn’t It a Pity de Nina Simone, son corps suit intuitivement la musique, tout à l’opposé des figures canonisées du ballet. Moins strict certes, mais pas moins intentionnel. « En danse classique, on apprend des chorégraphies qui existent depuis des années, explique-t-il. On doit rentrer dans un moule qui, au départ, a été créé pour quelqu’un d’autre. Ces impros m’aident à développer ma créativité et à lancer de nouveaux défis à mon corps. » Il n’est pas très exigeant quant aux vidéos : une seule prise avec son iPhone et un minimum de retouches. Dès la fin de la chanson, son rire résonne à nouveau entre ses quatre murs.
Quand il ne trouve pas les mots pour exprimer ce qu’il ressent, Siphesihle danse. C’est ce qu’il faisait en suivant le mouvement Black Lives Matter à travers le monde. « Je danse pour émouvoir, pour rendre les gens heureux ou pour les faire réfléchir ou pour transmettre un sentiment. C’est de toute évidence un moyen d’engager la conversation. »
Suivez Siphesihle November sur Instagram : @deshgrey